1. |
Bouddha
01:47
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P’tit matin blême, Lille, j’élimine l’ennui, j’énumère mille manières de voir la vie. Dans ma cervelle pas tout à fait vide, je fais l’tri sélectif de mes soucis. Je souris à la caméra de cette rame pérave, telle une épave entraînée par les flots. C’est flou, trop fou, ça se faufile dans les remous, rentre sort, c’est relou pour ceux qui suivent pas, ils frisent la crise d’épilepsie et pis c’est tout. Moi, j’épice et j’touille ma mixture épicurienne dans cette vie urbaine où les p’tits durs traînent, en quête d’aventure, se créent des avatars, veulent une belle voiture, sont toujours plus vantards et se changent en vautours, envoûtés par le veau d’or. Ils veulent chanter la vie à travers un vocodeur, toucher des droits d’auteur, parfumer leur odeur, prendre de la hauteur, jouer les stars éclairées, devenir des égéries, des artistes émérites pas trop édulcorés. Moi, j’rêve de dunes dorées où j’pourrais gambader sans arrêt pendant des lustres… Ok, j’m’égare, mais j’en ai marre de cette ligne droite, de cette histoire déjà écrite, frustré comme les vaincus des Amériques. Et là, j’médite comme un bouddha qui boude, qui doute, trop doux pour ce monde qui s’écroule, j’regarde l’onde qui s’écoule dans l’caniveau, ce clébard errant qui cherche des amigos, du Canigou ou bien des calinous. Tel Diogène dans son tonneau, sans sono, juste une bonne paire de yeuks, j’me sens solo mais j’veux voir sonne-per, comme quand t’as faim mais qu’t’as la nausée… J’suis fatigué, j’me dis : « mec, va t’poser » mais l’errance m’occupe, les créances au cul, j’fais mine de pas les voir, sans élégance aucune, je flâne dans les flaques d’eau, respirant les effluves du Mac Do. J’rêve d’embarquer sur un paquebot en partance pour n’importe où, le but n’a plus d’importance : des palmiers ou des pics, des campagnes ou des villes… Les neiges éternelles, moi j’veux les fouler vite.
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2. |
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Moi, j’ai pas de chez moi,
Pas vraiment de schéma,
J’ai bien quelques chemins
Mais ça reste du chinois.
Mon terroir est terrien,
S’étale sur tant d’hectares
Que j’me sens à l’étroit,
Ce, quelque soit l’endroit.
J’suis né dans le néant,
Un trou béant du nord,
Où les pâles aurores
Ne sont pas élégantes,
Où les gens, sous l’effort,
Montrent parfois les dents
Ou se plient sans se plaindre,
Aplatis par la crainte.
J’fais pas dans l’touristique,
C’était un trou sinistre,
C’est ça, mon patrimoine ?
Ben c’était parti mal !
Pavillons tatillons,
Vieux chasseurs nazillons,
Petites cités rurales
Ou même les murs râlent…
On les embellissait,
De l’art dans les cités ?
Je vous laisse décider,
On voulait exister.
C’était mon patrimoine,
Ma culture, mon éthique,
Non, c’était pas l’picard,
Ma référence poétique…
Refrain :
Ce n’sont qu’des impressions
Légèrement imprécises,
Le goût d’une pression,
Le nom d’une épicerie,
La brique rouge et le vent
Et cette mémoire de lutte,
Que j’entends, que je sens,
Qu’on écrit sur les murs.
D’la cambrousse à la tess’,
Des sabots aux baskets,
D’la mosquée à la messe
Et l’odeur de la mer,
Un parfum de friture,
Des parpaings de bitume,
La bière et le tajine,
Le pastis, le haschich…
Accordéon, hip-hop,
Salle de bal où l’on danse
La java, le bebop,
Imagine l’ambiance.
Des mines malmenées
Tout de même réjouies,
Des cités mal lunées
Où l’espoir est enfoui
Sous des tonnes de soucis,
Où les murs sont pourris
Où, même quand on sourit,
On fronce les sourcils…
Je n’ai pas de folklore,
De flatterie régionale,
Pas mal de décors glauques
A décrire au profane,
Je n’suis pas un gros fan
De ces fiertés locales
Que l’on exhibe aux masses,
Souriantes dans un bocal.
Raz l’bol des ch’ti friendly,
Va visiter les mines,
Ça n’a rien d’rigolo,
Dany le gigolo !
Refrain
Les imbéciles heureux
Qui sont nés quelque part
Sont des débiles peureux
Biberonnés au pinard,
Vieux flamands opiniâtres
Aux croyances bizarres,
Identitaires ignares,
Flics, odeur de Ricard…
Cette histoire est multiple,
Les champs et les usines,
Les accents, les musiques
Et les coups de fusil,
Cette histoire est complexe,
Les cultures, les contextes,
On chantonne, on conteste,
Pas d’histoires de comtesses,
Le patrimoine des faibles
Pourtant forts de la plèbe,
C’est celui que je plaide,
Espérant qu’il vous plaise.
Anecdotes de zinc,
Des blagues et des plaintes,
Le TER est plein,
Un gosse pleure, il a faim,
Sur la plage, on s’ra bien,
Même serrés dans un coin,
Saint-Tropez, c’est trop loin,
Là, c’est tout près, au moins…
V’là l’automne et la flotte,
On frissonne de la glotte,
On fume vite sa clope,
On recommande une chope…
Refrain
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3. |
J'fais du rap
04:48
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J'fais du rap, mecton, moi j'ai pas d'veston,
Je m'pose des questions sur des instrumentales
Et ça m'instruit l'mental, j'écoute des chansons
Aux accents d'autrefois mais moi, j'sais pas faire,
De ma voix j'suis pas fier, j'chante comme une cafetière
Alors je scande en rythme mes petites rimes
Sans prétention, en m'inspirant des anciens,
Sans oublier d'm'asseoir sur les académiciens,
Ces miliciens du verbe qui condamnaient la verve
Des poètes bourrés qui sans cesse couraient
Après un peu de gloire puis qui souvent mouraient
De n'avoir pas pu comprendre l'univers,
Un peu trop fiers, la tête un peu trop en l'air,
C'était Paris Canaille, le souvenir m'assaille
Alors qu'j'ai rien vécu de cette époque romancée,
Alors qu'mon existence ne fait que commencer.
Refrain :
J'fais du rap, y paraît
Qu'c'est pas pareil...
J'fais du rap, a priori, rien à voir avec Boris,
Avec Serges, avec Georges, on dira que c'est comme
Un burger aux morilles mais « Gare au gorille »
M'a autant bercé que « Fuck da police » !
C'est qu'un exemple, y'en a d'autres tout aussi amples,
J'avais pas d'guitare alors j'ai pris des samples.
Y'en a qui disent que c'est pas d'la vraie musique,
Que c'est pas poétique, que c'est juste rythmique...
Désolé si le rap choque leurs oreilles délicates
Mais le but du hip hop n'est pas d'être diplomate,
Faut qu'ça tape, faut qu'ça frappe comme le blues et le jazz
Et, comme pour la chanson, faut qu'ça parle, faut qu'ça jase
Sans se soucier de ceux qui froncent les sourcils
Et si ça fait hurler, t'inquiète, c'est pas un souci.
En 2030, tu verras, le rap sera ringard
Sauf s'il provoque aussi fort que Gainsbarre !
Refrain
J'fais du rap parce que j'aime ça mais pas que,
Si la musique est un pit, j'veux tirer sur sa queue
Pour qu'elle morde et déchire toutes les conventions,
Pas pour qu'elle ait son bac avec mention.
J'fais du rap parce que j'aime le rythme et la poésie
Et qu'j'ai pas envie d'choisir entre les mots et le flow,
J'ai juste besoin qu'le rap sorte de son enclos
Et qu'les vieux bougent la tête autant qu'les jeunes de té-ci,
C'est bien trop cliché ! Le hip hop est fiché :
« Musique de gamin » alors qu'il s'abreuve de tout,
Certains diront p'têtre que j'fais du rap de babtou
Mais j'fais du rap tout court, j'ai pas trouvé d'autre nom
Et j'continuerai, que t'apprécies ou non.
J'aime imaginer Brassens en master of ceremony,
Duke Ellington en DJ qui scratche en harmonie
Les solos machiavéliques de Paganini !
Refrain
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4. |
Ping Pong
03:51
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Mon petit scarabée, admire mon karaté,
Je n’suis pas là pour parader ni pour paraphraser,
Mon instinct s’exprime, écoute le parler,
Fin comme l’escrime, je swingue sur les charleys
Et me pose sur le kick comme un petit papillon,
En ce qui concerne le son, je suis un brin tatillon,
J’aime faire des longues phrases pour que s’étalent les syllabes
Et que fument les synapses des MC nases aussi légers que des bidasses,
Dès que je chausse mes godasses, j’ai besoin d’une instru bonasse,
Je me détends comme au sauna , j’transpire mais nique le Rexona,
Chaud comme la rage du Hezbollah, oulà, je fais de la politique,
Ça devient compliqué, je n’ai pas fait polytechnique
Mais armé de ma maudite éthique, je dissèque le monde,
Je digère le bon et recrache le reste
Mais les idées appétissantes peuvent devenir abrutissantes,
Une chose est sûre : la misère demeure indigeste.
Refrain :
Depuis le Big Bang, la vie fait du ping pong
Avec le yin et le yang, avec la livre et le yen,
L’homme ne serait pas homme s’il était privé de haine,
Livrés à eux-mêmes dans une immensité extrême,
Les humains se promènent dans cette densité urbaine,
La destinée humaine, ça sonne classe, tu trouves pas ?
J’ai fumé trois spliffs et j’ai senti le cosmos,
Foncedé à haute dose, j’ai cru voir quelque chose…
Dans la brume, j’ai vu le sourire du chat de Lewis Carrol,
Ne le dis à personne, faut pas qu’l’église s’affole,
D’façon, les geeks aphones, sur leurs p’tits I-phone
Le posteront quand même, l’humanité doit savoir,
La vie est ironie, tout n’est qu’affaire de hasard,
Humains de France et de Navarre, sages ou fous aux yeux hagards,
La même connerie, le même bazar, c’est ça comme,
On n’a pas d’saint-père, merde, on est tous des bâtards !
J’suis une espèce de moine shaolin alcoolique, un comique
Impoli, insolite, insomniaque, démoniaque,
Doux comme de l’amoniac, insortable, insupportable,
J’suis l’absurde, le fatal, le macabre, le banal,
Le double maléfique sur l’instru insouciante,
Un Confucius inconscient au discours inconstant,
Messie des incapables mais MC imbattable,
Quand je rappe, je tape du poing sur la table.
Refrain
La seule chose que je sais, c’est que je n’ai rien compris,
J’aimerais me reconnaître dans un dieu que l’on prie
Pour s’élever mais je suis trop au raz des pâquerettes,
Je picore les graines que les plus forts me jettent,
Je n’crie pas « ni dieu ni maître », moi j’aimerais bien m’y mettre,
Sortir de l’ivresse, il paraît que la Bible
Est toujours disponible chez tous les bons libraires,
Mais mon dieu est un micro, y’a que lui qui me libère,
Refrain
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5. |
C'est là
03:38
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6. |
Petit cri de pacotille
04:36
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7. |
Ça sent la sueur
02:44
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Refrain :
Ça sent la sueur et l’acide,
Impossible de rester placide,
A quoi bon rester ainsi ?
Regarde ces corps amincis.
Malgré tout, tu restes assis,
Tu attends peut-être un signe,
Tu bois ton sky d’un air digne
Mais ton verre est presque vide.
Mais qu’est-ce qui t’a pris d’aller dans cette boîte ?
T’as autant d’élégance qu’un vieux canard qui boite,
Si tu danses, t’es yégri, si tu t’saoules, t’es aigri,
T’avais pas vu les prix, d’la serveuse t’es épris
Mais elle mâche son chewing-gum en regardant ailleurs,
Esquivant les bonhommes qui pelotent son postérieur,
Tu voulais de la funk, ambiance seventies,
Pas des stars en slim qui gobent des Smarties,
Ils ont des lunettes, des poses de minettes,
Des doses de kleenex pour s’essuyer le zen’,
La gueule dans la cuvette, ils repartent aussi sec,
Un petit coup de peigne ou des tonnes de rimmel.
Refrain
Malgré toi, tu te laisses gagner par les boom,
Tu bouges sur le dancefloor, même si t’as l’air d’un clown,
Tu te crois dans un clip, tu transpires dans ton slip,
T’as l’air con mais tant pis, tu connais pas ces types
Qui se moquent de toi, tu t’en bats les yeuks,
Tu te tais mais dans ta tête tu leur dis « fuck »,
C’est des cons, tu t’en fous, et cette fille te drague,
Elle est jolie comme tout, ça doit être une blague…
Peut-être qu’elle s’est paumée elle aussi,
Ton envie de rester, elle grossit,
T’essaies de lui dire que t’as pas l’habitude,
Que d’ordinaire tu es sous d’autres latitudes
Mais tes mots se noient dans les infrabasses,
Putain, la drague, c’est tout un travail,
Surtout quand on ignore tout du terrain,
Perdu au milieu de tous ces terriens…
Refrain
Tu vomis de la bile, prostré comme un débile,
On toque à la porte, une meuf doit ser-pi,
Tu t’essuies et tu ouvres, c’est bien la même fille
Avec qui tu dansais, elle a le regard vide,
Elle a pas l’air en forme, elle se jette sur les chiottes
Et dégueule avant même que t’ais fermé la porte,
Tu la regardes faire, elle est belle,
Tu la sors des toilettes et tu lui roules une pelle,
Vous tombez tous les deux sur le carrelage humide
Et vous continuez malgré l’odeur d’urine.
C’est pas glamour comme truc
Mais tu souris comme un trouduc’…
Si t’es content, tant mieux, ma gueule,
Moi, je crois que je vais rentrer tout seul,
C’est pas plus mal, j’veux mon plumard,
Tu me raconteras la fin de l’histoire.
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8. |
Mentalité d'gendarme
04:25
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Pendant qu’les boss du rap jappent et cherchent les scalps de leurs rivaux,
Dans les caniveaux, le niveau de la merde arrive aux
Limites du supportable, comme aux States, ces faux gangsters
Veulent le port d’armes mais n’ont que leur portable pour se déchaîner,
Putain mais laissez-les décéder
Parce que leur vilain copain a refourgué plus de CD.
Y’a pas d’gang mais que des langues bien pendues,
Faut bien qu’ils aient léché des burnes pour avoir autant vendu,
Pour qu’autant de journalistes les aient entendus, étendu
Leur influence sur toutes les ondes pendant qu’les indés s’bouffent les ongles
Pour qu’leur zik soit une réalité et pas un genre,
J’me souviens du hip-hop, le but, c’est pas l’argent et la passion s’perd,
Dans cette nation d’merde, le patron t’guette,
Ce sale con t’jette quand t’es pas dans l’ton,
Et crois-moi, dans l’fond, c’est tout à fait normal
Car c’est dans son putain d’intérêt que tu t’en sortes mal.
Refrain :
Y’a plus rien d’militant dans l’rap,
On veut du gent-ar, plus rien à foutre des gens d’en bas,
Mentalité d’gendarme, plus de branle-bas d’combat,
Ils veulent plus de fric et niquent ceux qu’en n’ont pas.
Dans les tiers-quar, chez tous les exclus, tous les mis à l’écart,
La révolution ne prend plus, comprends-tu, putain, c’est tendu,
Chacun veut être un petit chef pour quelques miettes dans l’assiette,
C’est la seule recette, faire des thunes, c’est d’jà mieux qu’faire avec,
Au moins, ça s’bouge, ça s’secoue, se faire des sous pour des zedous,
Pour certains, c’est le seul atout, pas le temps de penser à tout,
Du coup, certains types se tapent et deviennent cinglés,
Parfois, l’homme préfère être affamé qu’être mal fringué.
Et puis toutes ces sapes dans les vitrines de la mode,
Ça donne tellement envie d’être une victime de Lacoste,
Dans tes rêves, tu te vois comme un big king de la pop,
Tout c’que tu peux espérer, c’est la dream team de la Poste…
Le micro est ché-bran, j’le prends comme d’la détente,
Celle du sommeil ou du flingue, la plume sur la tempe,
Le palpitant battant, piaillant comme un oiseau en cage,
Même si les actes manquent, béni soit le langage.
Refrain
L’égotrip revit, c’est classe, les tripes reluisent,
Des Mc’s prolifiques sur des beats solides,
Ça fait plaisir, c’est clair, mais dans la forme le fond s’éclipse,
Chacun brandit l’nom d’son équipe et les thèmes riches s’épuisent,
Les batailles de jadis sont bien rangées dans la remise,
Je n’les ai pas connues, c’est pour ça qu’j’aimerais qu’elles revivent,
Je s’rais ravi qu’ça arrive mais j’avoue qu’le doute m’anime
Quand j’écoute la zik des mômes d’aujourd’hui, j’ai des coups d’panique,
C’est bien joli la réussite, parfois, tu sais, j’aimerais aussi
Que ça m’arrive très vite et que mon portefeuille grossisse
Mais j’me sentirai bien seul en haut de la pyramide,
Soit disant rebelle mais entourés de mes pires amis,
Toutes les vacheries qu’j’déballe, je me les attribue,
Moi aussi j’contribue à ce mont d’détritus,
Qui détruit tout, puis qui nettoie avec de l’essuie-tout,
Et le pire, putain, c’est qu’ça nous séduit tous.
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9. |
Soir de dèch'
04:20
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Mwano Lille, France
Créchant au milieu des briques rouges, Mwano gribouille des rimes et bidouille des beats, en groupe ou en solo. Liant intimement le rythme et le texte, le sens et la forme, le sampling et l’interprétation, ce MC/beatmaker est grave open, n’hésitant pas à piocher ses influences là où bon lui semble : des Roots à Gainsbourg, de Bobby Lapointe à Rocé, d’MF Doom à Miles Davis… ... more
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